Attention texte méchant

À CEUX QUI NOUS ONT OFFENSÉS

Avec Bruno Tuchszer
Mise en scène de Carine Bouquillon et Bruno Tuchszer 
Lumières : Marc Weugue 


Il était une fois dans la campagne normande un petit garçon qui lisait Astrapi, qui croyait naïvement que le Petit Jésus entendait ses prières et qui se préparait à entrer en sixième. Il était une fois une grand-mère douce et pieuse qui élevait seule le gentil petit garçon, et qui lisait des psaumes au coin du feu. Mais cette enfance insouciante n'est qu'une illusion, un prélude à la vraie vie, « la lente et patiente fabrication d'une proie pour le collège de Buchy ». Trente ans plus tard, à la faveur d'un événement anodin (dont la révélation constitue l’impressionnant retournement final du récit) le petit garçon devenu adulte revit ses années de collège, passées sous les coups et les crachats, en un monologue glaçant d'humour noir.


Attention texte méchant
Le 29 janvier 2016 j'étais à Strasbourg. Je devais y jouer le lendemain Une Mort Moderne, monologue adapté du roman de Carl Henning Wijkmark, que je tourne depuis plusieurs années. Pour lire dans ma chambre d'hôtel, j'avais emporté Le Collège de Buchy sans rien connaître du roman ni de l'auteur.
Le 30 janvier, ayant à peine fermé l’œil, je prenais sur moi et attendais l'horaire décent de 9 heures du matin pour contacter Jérémie Lefebvre, et lui demander l'autorisation de porter son roman sur les planches. Ce n'est pas un auteur très connu : il suffisait de lui écrire sur sa page Facebook. Il me répondit dans l'heure.
Le Collège de Buchy vous laisse hagard et les mains tremblantes. Plus qu'une écriture, Jérémie Lefebvre possède une langue, qui le destine naturellement à être dit, ou plutôt à être proféré en public. Il est de la trempe des imprécateurs, d'un Rodrigo Garcia, sans la provocation « trash » de l'homme de théâtre, ou d'un Philip Roth, dont les personnages vocifèrent en de flamboyantes logorrhées. C'est surtout un maître de l'humour noir, ce qui lui confère une dimension particulièrement adaptée à la représentation.
Dans sa surenchère haineuse, dans sa drôlerie atroce, ce soliloque n'est pas si éloignée du stand-up, mais un stand-up cruel à l'éblouissante virtuosité littéraire. Il serait injuste de réduire À ceux qui nous ont offensés, notre adaptation du roman de Jérémie Lefebvre, au grand texte sur le harcèlement scolaire qu'il est pourtant. C'est avant tout un alléchant morceau de théâtre, à déguster saignant.

Bruno Tuchszer

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