« Au début de l’année, j’aurais fait n’importe quoi pour que Céline Beauroger soit amoureuse de moi »

Les petits garçons se transformaient en porcs sanguinaires à peine arrivés au collège de Buchy. Leur férocité semblait n’avoir attendu qu’une chose pendant toute l’école primaire : la cruauté consubstantielle au statut de collégien de Buchy. Pour ce qui est des filles, j’apporterai une nuance. Elles ressemblaient encore à des petites filles dans leurs premières semaines de sixième, elles étaient même assez mignonnes avec leurs nattes et leurs yeux farouches de Haut-Normandes, mais très vite elles décidaient de ressembler à des collégiennes de Buchy, devenaient méchantes et se faisaient faire des coupes de cheveux horribles. Au début de l’année, j’aurais fait n’importe quoi pour que Céline Beauroger soit amoureuse de moi, mais lorsqu’elle arriva un matin coiffée comme un caniche américain, cet amour devint souffrance et mon cœur se mit à errer dans le crépuscule qui baignait à toute heure le collège de Buchy. Je me demandais où étaient passés les longs cheveux lisses de Céline, où s’en était allée la beauté du monde reflet de la splendeur de Dieu, et j’essayais vainement de la reconnaître dans cette poupée misérable qui, en plus d’être allée chez le coiffeur, s’était acheté des bottines rouges qu’elle traînait sous la pluie pendant que ses mèches dégoulinaient comme des poils de chien.
pp. 23/24

À lire sur le site, d’autres extraits du Collège de Buchy, le nouveau roman de Jérémie Lefebvre.

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