Mauvais Potage, c'est pas de la soupe !

Fin mars début avril, il fera encore frisquet : une bonne raison pour se délecter d'un Mauvais Potage !
Enfin... il s'agit en fait de l'excellent petit recueil de nouvelles, toutes signées Élodie Da Silva.

8 € - 70 pages
ISBN 979-10-90424-10-4

Présentation

« Mauvais potage », c’est le brouet ordinaire, l’insipide soupe des jours maigres ; l’allégorie de la banalité. Et pourtant... Et pourtant, Élodie Da Silva brosse à grands traits, de son écriture ingénue, oscillant avec légèreté entre spontanéité et poésie, des destins sortant des ornières où le regard morne et désintéressé des passants les aurait confinés. Car il faut être sensible pour déceler les fêlures de ces personnages quelconques et en faire les émouvants héros d’un quotidien auquel personne n’échappe.
Celle qui parle si bien des paumés a assurément trouvé sa place en littérature.

Morceau choisi
Seule au milieu du salon déserté, déversant mon flot de larmes et de morve sur la moquette, je finis par céder à l’ignorance de mes parents et m’interroge sur les activités de ma mère en cet instant. Celles de mon père ne me soucient guère, elles sont toujours les mêmes et ne me touchent pas. Mon père écrit. Il écrit sûrement tout ce qu’il ne dit pas, tout ce qu’il fait semblant de ne pas voir. Il pose ses idées molles sur le papier dont l’odeur me fait horreur.
Mais que fait-elle, cette mère barbare et obstinée, capable de laisser sa petite fille se vider de tout ce chagrin sans bouger ?
Désabusée, je me relève. J’avance doucement vers le couloir et m’y aventure doucement. Au bout du couloir, la porte de la salle de bains est entrouverte et la lumière allumée. J’avance à tâtons dans ce couloir démesurément long, tâchant de ne pas faire entendre le frottement de mon pantalon qui traîne par terre. Enfin arrivée devant la salle de bains, je me replie contre le mur. Progressivement, je glisse un oeil dans la pièce. J’ai six ans et je ne suis pas grande. Maman ne me voit donc pas dans le reflet du miroir qu’elle scrute comme un tableau curieux.
Elle se regarde, maman. Appuyée sur les bords du lavabo comme à un déambulateur, maman se regarde. Elle se regarde et je la regarde se regarder un long moment, puis elle laisse échapper un gros sanglot. Maman pleure.
(Extrait de Filles de pute)

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